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Surtourisme : à Bali, les habitants demandent une pause dans les projets touristiques

Fatigués du tourisme de masse dont ils sont pourtant dépendants, les Balinais aspirent à plus de calme et de sérénité avec une pause des projets touristiques.

A Bali, l’activité touristique fait vivre des milliers de personnes. Mais les habitants de l’île indonésienne, plus touristique que jamais, arrivent à saturation. Ils demandent l’instauration d’une pause dans le développement des projets touristiques. Comme à Canggu, spot de surf bien connu des étrangers, dans le sud de Bali. Avant, Canggu était un village vert et paisible au bord de la mer, entouré de rizières.

A présent, cette localité est remplie d’hôtels et ses rues sont constamment embouteillées par les voitures, les scooters et les camions. Les autorités ont annoncé un projet de gel pendant deux ans des constructions d’hôtels, villas et discothèques, qui devrait restaurer un peu de tranquillité sur l’île hindouiste. A condition qu’il soit appliqué. « Canggu est plus animé à présent… sa tranquillité et sa verdure disparaissent progressivement », se désole Kadek Candrawati, 23 ans. 

Trois millions de visiteurs en six mois

Comme d’autres résidents, elle pense que des mesures sont nécessaires au vu des changements drastiques connus par Canggu. « Le gouvernement et la communauté doivent travailler ensemble pour s’assurer que Bali reste verte, ait un avenir durable, et que la culture locale soit préservée », poursuit la jeune femme, propriétaire d’un magasin de location de moto qui lui rapporte sept millions de roupies (418 euros) par mois.

Avec sa végétation luxuriante, ses rizières et ses plages prisées des surfeurs, Bali, qui offre des complexes hôteliers de luxe comme des repaires de routards, voit un nombre croissant de touristes. L’île a attiré près de trois millions de visiteurs étrangers pendant la première moitié de l’année, la plupart venant d’Australie, de Chine et d’Inde, selon les statistiques officielles.

Les touristes étrangers ont dépensé en moyenne 1 516 euros par visite l’année dernière, contre 1 068 euros en 2019 avant la pandémie de Covid-19, selon l’agence indonésienne des statistiques. Après la pandémie qui a fait s’effondrer le nombre de touristes, le gouvernement a d’abord tenté de ramener rapidement les étrangers à Bali en offrant des visas spécifiques aux « nomades » numériques (travailleurs à distance) et des « visas dorés » aux gros investisseurs. Mais l’île veut rétropédaler.

Un deuxième aéroport international en projet

Sandiaga Uno, ministre du tourisme jusqu’au mois dernier, avait indiqué que le plan de gel, dont l’objectif est d’empêcher le développement de nouvelles infrastructures  massives dans les zones touristiques, serait mis en place pendant le mandat du nouveau président Prabowo Subianto, sans définir de date. Un système de métro léger est aussi en projet afin de faciliter le trafic dans l’île.

Pourtant, les déclarations de Prabowo Subianto font douter de sa volonté de stopper le développement accéléré de Bali. Lors d’une rencontre avec des dirigeants locaux, il a promis un deuxième aéroport international, afin de faire de Bali « la future Singapour, la future Hong Kong… un centre économique ». Pour le groupe de défense de l’environnement indonésien Walhi, il est déjà trop tard. « Bali est désormais bien trop construite, les espaces verts deviennent urbanisés », déclare son directeur exécutif, Made Krisna Dinata.

« Le moratoire proposé devrait être une législation devant non seulement arrêter le développement mais aussi protéger les terres », ajoute-t-il. Les dégâts infligés à la beauté naturelle de Bali sont déjà visibles. Une marée de déchets plastiques submerge régulièrement ses plages, tandis que la surexploitation des eaux souterraines a asséché plus de la moitié de ses rivières.

Les mauvais comportements des touristes pointés du doigt

Le tourisme de masse menace également son système d’irrigation traditionnel, classé au patrimoine mondial par l’Unesco, qui alimente les rizières, à mesure que les zones vertes qui recueillent l’eau sont recouvertes de constructions. Récemment, des vidéos devenues virales ont montré des blocs de calcaire chutant dans la mer, en conséquence de l’excavation de falaises pour bâtir des villas dans le sud de Bali.

Les mauvais comportements des touristes sont un autre facteur d’exaspération pour les locaux, notamment des incidents lors desquels des étrangers ont posé nus dans des sites sacrés au mépris des traditions et des interdits. Les autorités assurent que le gel des constructions vise à trouver un équilibre entre l’apport de revenus touristiques et la préservation de l’île.

Le moratoire devrait aussi aider à développer des infrastructures au-delà du sud de Bali, où les touristes se concentrent actuellement, selon Tjok Bagus Pemayun, directeur du bureau du tourisme de Bali. Pourtant, tout le monde n’est pas en faveur d’une pause. I Gusti Ngurah Rai Suryawijaya, vice-président de l’association des hôtels et restaurants de Bali, appelle à une enquête plus approfondie avant de prendre des mesures pouvant nuire aux Balinais qui dépendent du tourisme.

« Quand il y a trop d’offre, un moratoire est acceptable afin de diminuer la concurrence, mais en ce moment, la demande augmente ». « Notre taux d’occupation atteint les 80 à 90% », conclut-t-il.

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