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Stations de montagne dans le monde : comment sont-elles organisées ?

Spécialiste du tourisme en montagne, Armelle Solelhac, par ailleurs fondatrice de l’agence de communication Switch, Armelle Solelhac, dresse un état des lieux intéressant des stations de montagne dans le monde.

La saison d’hiver 2023/2024 se termine dans l’hémisphère Nord, alors que les stations de montagne de l’hémisphère Sud se préparent à ouvrir leurs domaines skiables. En France, les premiers résultats de fréquentation et de chiffre d’affaires sont mitigés. Les chiffres nationaux sont certes à la hausse, mais ils sont en réalité tirés vers le haut grâce aux stations des Alpes.

Les stations alpines ont très bien performé, alors que tous les autres massifs connaissent des difficultés. Cette situation, couplée avec un phénomène de « ski bashing » et les conséquences du changement climatique, soulève de nombreux questionnements sur la transition des modèles économiques des stations de montagne.

Dans ce cadre, il semble intéressant de s’interroger sur les modes d’organisation et de gestion des stations dans le monde. Panorama.

Etat des lieux des stations de montagne dans le monde

En 2024, 68 pays dans le monde offraient 1805 domaines skiables en plein air équipés d’au moins 4 remontées mécaniques et recouverts de neige. Outre les traditionnelles destinations de ski que sont les pays de l’arc alpin, d’Amérique du nord ou le Japon, de nouvelles destinations tentent de rivaliser en Europe de l’Est ou encore en Chine. En parallèle, il existe un certain nombre d’autres petits acteurs répartis dans le monde entier : Chypre, Grèce, Inde, Iran, Israël, Liban, Lesotho, Maroc, Nouvelle-Zélande, Australie, Afrique du Sud, Pakistan, Turquie….

© Julia Luczak-Rougeaux

On compterait environ 50 millions de pratiquants de sports d’hiver. Alors que sur les marchés matures, le nombre de skieurs a stagné, voire décru, le nombre de pratiquants a augmenté en Europe de l’Est, ainsi qu’en Asie centrale, et tout particulièrement en Chine.

Si la fréquentation touristique et les recettes de la saison estivale en stations de montagne ont longtemps fait pâle figure à côté des résultats hivernaux, les conséquences de la pandémie de Covid-19 ont permis depuis quatre saisons à de nombreux touristes de (re)découvrir ce cadre enchanteur en été.

Les stations de montagne ont donc aujourd’hui l’opportunité de réinventer leurs modèles d’affaires et d’organisation.

Les modèles d’organisation des stations de montagne dans le monde

On observe trois modèles de gestion et de fonctionnement des stations de montagne dans le monde : le modèle « concentré », le modèle « éclaté » et le modèle « fédéré ».

1. Le modèle concentré

En Amérique du nord, dans l’hémisphère Sud, au Japon, en Scandinavie, on constate que le financement et la gestion des stations sont, dans la majorité des cas, assurés par une seule entité, publique ou privée. Celle-ci détermine seule la politique de développement et la gestion du site, dont elle est propriétaire.

Toutefois, lorsqu’une station se situe dans un Parc naturel ou national soumis à une réglementation particulière, les autorités en charge du parc participent à la gestion et au développement des lieux (comme Marmot Basin à Jasper, Canada).

On distingue quatre modes de gestion concentrée des stations :

  • la gestion institutionnelle : les stations gérées par une association à but non lucratif, un État ou une Province sont peu nombreuses. Il y a en général peu ou pas de logements, ni de commerces aux abords. Leur but n’est pas nécessairement de dégager des profits financiers, mais uniquement d’avoir suffisamment de moyens pour ouvrir le domaine skiable l’hiver suivant ;
  • la gestion par des particuliers : ces stations appartiennent et sont gérées par des particuliers possédant le terrain, les remontées mécaniques, et parfois des logements et des commerces. Il arrive que certains d’entre eux possèdent plusieurs stations ;
  • la gestion par des entreprises privées : ces stations appartiennent et sont gérées par des sociétés privées possédant le terrain, les remontées mécaniques, certaines infrastructures sportives (par exemple : centre aquatique, golf) ou culturelles (Théâtre, centre de conférences), et parfois tout ou partie des commerces (magasins de location de matériels de ski, restaurants, etc.) et des logements ;
  • la gestion par des groupes : ces stations appartiennent et sont gérées par des groupes possédant plusieurs stations de montagne, ainsi que différentes structures de loisirs. Ceux-ci sont en général propriétaires du terrain, des remontées mécaniques, des logements et des commerces (quelques concessions sont cédées pour ces derniers). Comme pour les chaînes d’hôtels ou de restaurants, on retrouve toujours les mêmes caractéristiques d’une station à l’autre. On y trouve aussi un standing et des points de repère récurrents, tels qu’une chaise géante sur la place centrale ou une remontée mécanique au cœur du village pour les piétons, etc.

Ce fonctionnement autocratique favorise la mise en œuvre d’une politique commune et d’objectifs partagés. À condition que les ressources financières soient suffisantes, la prise des décisions, la rapidité de leur exécution et leur réalisation concrète sont incontestablement facilitées. Toutefois, les risques et les coûts financiers sont lourds et supportés par l’unique donneur d’ordre. En outre, le quasi-monopole de ce dernier fait obstacle au développement des initiatives locales.

2. Le modèle éclaté

En Europe, et plus épisodiquement en Australie, les stations de montagne sont gérées par plusieurs entités publiques et/ou privées, qui se partagent l’organisation des différents secteurs d’activités. D’une manière générale, le terrain appartient aux communes ou à l’État/la Province. Il est donné en concession à des sociétés, qui peuvent être privées, publiques ou d’économie mixte, pour l’exploitation des remontées mécaniques et des pistes.

La communication et la promotion du site sont assurées par un office de tourisme local, intercommunal, de vallée et/ou régional. Les communes prennent en charge tout ce qui touche à l’urbanisme. Les commerces et les logements appartiennent à des propriétaires privés (particuliers ou entreprises commerciales). Tous ces acteurs agissent indépendamment les uns des autres.

Là encore, si une station se trouve dans les limites d’un Parc naturel, les autorités en charge du parc supervisent le développement des lieux (comme Mount Buller et Perisher Blue en Australie). Ce mode de gestion « éclatée » complique sérieusement la prise de décision et l’adoption d’une politique commune.

Néanmoins, il permet un véritable partage des gains et des charges entre les différents acteurs. En outre, il prend davantage en compte les populations et les spécificités locales. On le trouve principalement en Europe de l’ouest, et en particulier dans les Pyrénées et les Alpes françaises, italiennes, suisses et autrichiennes.

3. Le modèle fédéré

Pour surmonter les difficultés liées au mode de fonctionnement « éclaté » auxquelles elles sont confrontées, certaines stations européennes, telles que Trysil et Geilo en Norvège ou encore Grächen en Suisse, ont souhaité se doter d’une gouvernance. Celle-ci est en charge de la concertation et de la coordination des différents acteurs de la station : la commune, le ou les exploitant(s) des remontées mécaniques, les commerçants, les hébergeurs, les copropriétaires de biens immobiliers, les professionnels de la montagne (écoles de ski, pisteurs- secouristes, guides de montagne, etc.), ainsi que les autres structures participant au bon fonctionnement de la station. En mettant en place cette gouvernance, les stations tentent de lutter contre la force centrifuge des systèmes d’acteurs ouverts. L’objectif est donc de fédérer chacun de ces acteurs pour définir une ligne de conduite et des buts communs.

Armelle Solelhac

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