Logis Hôtels : « Nous avons créé nos propres indicateurs RSE »
Le groupe Logis Hôtels, qui regroupe 1 850 établissements, est très engagé en matière de RSE et souhaite se développer sur le segment premium. Entretien avec son directeur général Karim Soleilhavoup.
L’Echo touristique : Pouvez-vous nous faire un rapide état des lieux du groupe et rappeler son positionnement ?
Karim Soleilhavoup : Via six marques*, le groupe agrège 1 850 établissements dans huit pays. Logis Hôtels, la marque principale, en dénombre 1 700 partout en France. Il n’y a pas de maillage aussi dense pour un groupe hôtelier (volontaire, avec des hôtels indépendants, NDLR). La marque mère Logis Hôtels est positionnée sur l’hôtellerie – entre 20 et 30 chambres – et la restauration familiale. Nous sommes dans un groupe où il n’y a pas un établissement qui ressemble à un autre. Nous cultivons la singularité et nous sommes à l’opposé de la standardisation.
Qu’en est-il des autres marques ?
Karim Soleilhavoup : Sur le salon EquipHotel 2022, nous avons lancé deux marques premium : Demeures & Châteaux, et Singuliers Hôtels, des établissements contemporains 4 et 5* avec des parcours client structurés comme par exemple le check-in accéléré. Ces marques sont aussi là pour permettre à certains hôteliers de monter en gamme, afin d’aller chercher une catégorie de clientèle que la marque Logis Hôtels ne permettait pas.
À côté de cela, nous avons nos deux marques urbaines et péri-urbaines : Cit’Hotel, un peu moins de 100 établissements en catégorie 2 et 3*, et Urban Style, 17 adresses en 3 et 4* lifestyle avec une offre de néo restauration composée de finger food, apéritifs dinatoires, planches à partager… Avec Urban Style, nous espérons avoir une trentaine d’établissements d’ici 2025.
Enfin, la dernière marque, Auberge de Pays, s’appuie sur des établissements de 9 chambres maximum situés dans les territoires ruraux et qui sont le fruit de partenariats public-privé. Pour l’instant, nous n’avons qu’une seule adresse, à Bologne en Haute-Marne. Nous avons toutefois deux projets en cours, un dans le Gard, et un autre du côté de la Vendée. Nous discutons avec les deux municipalités.
Avez-vous des projets quant à la création d’une marque supplémentaire ?
Karim Soleilhavoup : Je n’écarte pas l’idée un jour de créer une marque supplémentaire. Mais avec ces six marques nous couvrons à peu près tous les segments de marché répondant aux attentes du client. On ne créée pas une marque parce qu’elle va générer de la valeur ou de l’equity. On le fait parce qu’elle correspond aux besoins des clients et des hôteliers avec des engagements RSE extrêmement forts.
Justement comment s’articule votre politique RSE ?
Karim Soleilhavoup : Elle est au cœur de notre développement. Nous sommes engagés localement. 85% de nos achats s’effectuent au niveau de la région. Nous sommes le seul groupe hôtelier labellisé Lucie 26 000, une émanation de la norme ISO 26 000, ce qui atteste notre volonté d’être dans une logique d’amélioration continue.
Nous nous adressons à ceux qui craignent ne pas réussir leur transition environnementale.
Comment engagez-vous les établissements, indépendants, dans cette démarche ?
Karim Soleilhavoup : Notre souhait n’est pas d’aller chercher ceux qui sont déjà convaincus mais de nous adresser à ceux qui craignent ne pas réussir leur transition environnementale. Nous avons créé pour cela nos propres indicateurs RSE, Acte Eco puis Acte Eco Restauration, afin d’emmener pas à pas nos hôteliers vers l’éco label européen. Nous créons avec eux un chemin.
Par exemple, avec Acte Eco, l’hôtelier s’auto-évalue au travers de 70 critères. Ceux qui ont une note supérieure ou égale à 7 ont le droit à une communication sur le site de Logishotels.com. Cela créée un petit challenge entre eux. Un plan d’accompagnement personnalisé est proposé par des responsables régionaux. Différentes voies sont possibles pour améliorer sa RSE. Certains vont davantage jouer sur la partie sociale, d’autres plutôt sur la partie environnementale.
43% de notre empreinte carbone est liée à l’alimentation (hors Scope 3).
Quelle est selon vous la principale source d’amélioration ?
Karim Soleilhavoup : C’est ce qui se passe dans l’assiette. 43% de notre empreinte carbone est liée à l’alimentation (hors Scope 3, NDLR). C’est elle la première, responsable d’émissions de gaz à effet de serre. Le standard de consommation correspond à 180 grammes de protéines animales. Si l’on passe de 180 à 150 grammes dans chacun de nos 1 500 restaurants, chaque année, nous allons économiser 15 milliards de litres d’eau et 44 000 tonnes d’équivalent CO2. Nous apportons des solutions, nous faisons de la pédagogie et nous accompagnons un à un nos adhérents dans le pilotage de ces données. Nous faisons un point chaque année sur tous les items d’exploitation.
Je pourrais prendre aussi l’exemple de la blanchisserie avec 4,5 tonnes d’équivalent CO2 économisés chaque année en internalisant ce service. Ou encore une plus grande sobriété énergétique et l’amélioration des conditions de travail en cuisine.
En matière de RSE, nous travaillons toujours sur trois dimensions : l’environnemental, le social en revalorisant l’attractivité de nos métiers et de nos emplois, et le sociétal avec par exemple des pommeaux de douche dans les chambres qui réduisent la consommation d’eau. Derrière, l’idée, c’est que tous les gens qui viennent chez nous s’équipent d’un tel système chez eux dans leur salle de bains.
Dans le cadre de vote politique RSE, pourquoi n’avez-vous pas intégré le Scope 3 dans votre bilan carbone ?
Karim Soleilhavoup : Dans le bilan carbone du groupe Logis Hôtels, nous n’avons pas intégré la partie déplacements des clients. Dans le secteur du tourisme et de l’hôtellerie, on réduit trop souvent le Scope 3 aux déplacements des clients qui figurent en tête des GES d’un bilan carbone dans le voyage. Le transport représente 69% de l’empreinte carbone du secteur du tourisme, et le transport aérien 29% à lui seul. Aussi cette dimension « déplacements des clients » est certainement celle où les hôtels ont un impact direct limité, et sa mesure correspond à une lourde collecte d’informations. Je rappelle que 60% des clients du groupe sont français et se déplacent majoritairement en voiture. Avec un hôtel tous les 12 km sur le territoire français, c’est davantage l’organisation des transports au niveau national et local qui aura un impact sur ce sujet. Nous sommes cependant actifs en développant le réseau de bornes électriques au sein de nos établissements dans le cadre de l’électrification du parc automobile français. Nous n’avions pas besoin d’un bilan carbone pour le faire. Près de 1 000 bornes sont aujourd’hui installées.
Dans le bilan carbone du groupe, nous avons naturellement intégré les autres éléments du Scope 3 tels que la consommation d’eau froide, la blanchisserie, le petit-déjeuner, les repas…, C’est ce qui nous a permis de mieux qualifier et d’identifier la restauration et particulièrement l’approvisionnement comme un élément structurant de GES sur lequel nous pouvons en accompagnant les hôteliers avoir un impact direct.
Vous revendiquez une politique RSE engagée, mais est-ce suffisant pour vous démarquer de la concurrence ?
Karim Soleilhavoup : Oui car trois éléments clés nous permettent de nous différencier. Tout d’abord la notoriété de nos marques, avec un seul site Internet, Logishotels.com. Le deuxième axe, c’est la dé-standardisation qui correspond aux attentes des clients en quête d’expériences renouvelées. Enfin, le troisième élément, c’est l’unité de lieu entre l’hébergement, la restauration, et de plus en plus le bien-être. Vous n’êtes pas obligés de sortir pour aller au restaurant quand vous êtes dans votre hôtel, c’est un vrai point fort.
Nous avons quasiment doublé notre chiffre d’affaires depuis 2019.
Quels devraient être vos résultats cette année ?
Karim Soleilhavoup : A périmètre quasiment stable, la centrale de réservation du groupe devrait enregistrer un chiffre d’affaires de 263 millions d’euros sur l’exercice qui se termine à la fin de l’année. Cela représente une croissance de 10% par rapport à 2023. Il s’agit-là de la sixième année de croissance consécutive. Nous avons quasiment doublé notre chiffre d’affaires depuis 2019. Sur la période la plus inflationniste entre 2022 et 2024, les prix moyens des chambres vendues sur logishotels.com ont augmenté de 9%. L’effet « inflation » est marginal dans la croissance du chiffre d’affaires de la centrale de réservation sur la période 2019–2024.
Notre clientèle est composée de 65% de Français et 35% d’internationaux.
Notre travail, c’est aussi de développer les ventes directes. À date via le site Logishotels.com, cette part augmente de 14% par rapport à 2023, contre +3% pour les OTA.
Sur la clientèle affaires, nous avons une croissance de 26%, ce qui fait qu’on est en train de gagner la bataille de la basse saison qui est extrêmement importante pour nos établissements.
Quant à notre programme de fidélité, il est en croissance de 14% cette année pour atteindre les 100 millions d’euros.
J’ai besoin de voir ce qui se va se passer sur le plan économique.
Quelles sont vos ambitions en termes de chiffre d’affaires en 2025 ?
Karim Soleilhavoup : Nous continuerons d’être en croissance, mais je ne veux pas trop m’avancer au niveau du chiffre d’affaires car j’ai besoin de voir ce qui se va se passer sur le plan économique. J’ai quelques alertes au regard du taux de défaillances des entreprises. Il y en a eu 64 000 en 2019, nous sommes déjà à 67 000 au 31 octobre. Les plans sociaux en cours (Michelin, Auchan…) ne sont pas de nature à rassurer. Cedi dit pour 2025, j’ai déjà engrangé un volume de réservations supérieur à celui engrangé à la même période l’an dernier pour 2024. Les indicateurs sont plutôt positifs, mais je demeure prudent au regard du contexte social et économique tendu. Et puis, nous n’avons plus l’effet boosteur des JO.
*Logis Hôtels, Cit’Hotel, Singuliers Hôtels, Demeures & Châteaux, Urban Style et Auberge de Pays
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