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Les compagnies s’engouffrent derrière Air France

A sept mois de la fin des commissions d’Air France, la quasi-totalité des compagnies étrangères s’est engouffrée dans la brèche grande ouverte. Si cette évolution est angoissante, elle a le mérite de rendre plus lisible le nouveau modèle économique par le client.

Pour une fois, ce ne sont pas les Anglais mais les Espagnols qui ont tiré les premiers. Alors que la fronde se poursuit toujours contre l’accord Snav/Air France avalisant la fin des commissions, Iberia est la première compagnie étrangère à être sortie du bois. Elle a informé les distributeurs français dès le 28 septembre (par lettre recommandée) qu’elle passerait elle aussi à la commission zéro le 1er avril. Pour rémunérer le statut de mandataire des agences, le transporteur espagnol continuera néanmoins à verser une compensation financière sur les tarifs publics commissionnés (hors tarifs groupes et négociés).

Même si les autres majors européennes n’ont pas encore officiellement franchi le Rubicon, le salon Top Resa a été un bon moyen pour préparer les agences à ce changement majeur. On va suivre la tendance du marché, mais nous n’avons pas encore choisi entre 0 ou 1 %, précise Patrick Malval, directeur général France de British Airways, qui devrait prendre sa décision avant fin octobre. En Grande-Bretagne, le transporteur a choisi le 1 %, ce qui lui permet de toujours passer par le BSP. Vu notre type de trafic, plutôt haute contribution, certaines agences nous ont clairement indiqué que cela valait le coup de conserver un taux fixe, même à 1 %, poursuit Patrick Malval.

Quel que soit le système choisi, la compagnie britannique devrait préserver le statut de mandataire des agences. Et mettre en place des frais de services pour ses ventes directes (aéroports, téléphone et Internet), soit 15 % de son activité en France. Depuis le 1er avril 2004, nous prenons déjà 10 E pour chaque billet moyen-courrier vendu par téléphone et nous le ferons aussi pour les long-courriers à partir du 1er novembre. Pour tous les billets papier, nous facturons par ailleurs des frais supplémentaires de 25 E, ajoute Patrick Malval. British Airways prévient qu’elle reverra à la hausse sa grille de frais, au moins au niveau de celle d’Air France, mais que cette dernière ne comportera que cinq ou six niveaux. Les frais déjà perçus en France nous ont permis d’observer que nos clients n’y étaient pas opposés. C’est un bon signe pour les agences.

Lufthansa hésite encore entre 0 et 1 %

Chez Lufthansa, on temporise encore. Rien n’est décidé sur la date mais le transporteur national donne toujours le ton, nous nous adapterons, précise Axel Hilgers, directeur général France. A priori, la compagnie n’envisage pas de changement avant le 1er mai au plus tôt. Et elle hésite toujours entre 0 % et 1 %. Lufthansa prendra elle aussi des frais de service pour ses ventes directes. Nous nous alignerons. Si Air France prend 70 E pour un billet long-courrier haute contribution, nous ne pourrons pas facturer 50 E. Cela reviendrait à affaiblir les marges des agences, qui s’aligneront aussi. Elles génèrent toujours 95 % de nos ventes en France.

Chez les partenaires euro-péens d’Air France, la situation est claire. Logiquement, KLM, fusionnée avec le transporteur français depuis juin, a profité de la présentation à Top Resa du programme d’hiver des deux compagnies pour annoncer qu’elle prendrait la roue d’Air France dès le 1er avril. Idem pour la compagnie tchèque CSA et pour Alitalia, qui devrait changer son modèle avant juin 2005.

Pour les américaines, l’affaire est entendue…

Côté compagnies américaines, qui avaient inauguré le passage à la commission zéro aux Etats-Unis en 2002, l’affaire est également entendue, même si elles entretiennent un peu le suspense. Nous n’irons pas à l’encontre du mouvement déjà initié aux Etats-Unis, précise Béatrice de Rotalier, directrice générale France de Delta. La réaction de la partenaire d’Air France devrait être d’autant plus rapide qu’elle vole en partage de codes avec la compagnie française. Même chose pour Continental et Northwest, qui viennent d’intégrer SkyTeam. Les deux américaines rivales, United et American, ne devraient pas être en reste.

La dynamique n’épargnera pas non plus les compagnies asiatiques. Nous passerons à la commission zéro probablement vers juin ou juillet, précise Gilles Ringwald, directeur commercial France de Thaï Airways. Le transporteur envisage aussi de prendre des frais pour ses ventes directes. Nous nous orientons vers 30 E pour les billets basse contribution et 70 E pour la haute contribution, sans différenciation entre les différents modes de distribution, ajoute Gilles Ringwald. La compagnie précise toutefois qu’elle propose déjà en majorité des prix nets aux agences, qui margent comme elles l’entendent. C’est aussi le cas chez Singapore Airlines, qui fonctionne depuis longtemps sur ce modèle. Le changement pour les agences sera donc moins radical…

Air Mauritius, Emirates… des francs-tireurs qui résistent

Restent quelques francs-tireurs, qui semblent décidés à maintenir une commission. Nous ne nous sentons absolument pas tenus de suivre Air France, précise Jean-Luc Grillet, directeur général France d’Emirates, fidèle à sa stratégie de non-alignement. Mais là encore, c’est surtout parce que la compagnie propose une majorité de tarifs nets que le taux de 7 % n’a finalement qu’un impact limité. Chez Air Mauritius aussi, on résiste. La commission zéro n’est absolument pas à l’ordre du jour. Même si nous sommes en partage de codes avec Air France entre Paris et Maurice, il y a des points sur lesquels nous pouvons rester différents. La politique de distribution en est un, assure Donald E. Payen, directeur Europe d’Air Mauritius. La question est de savoir jusqu’à quand ?

La généralisation de la commission zéro semble donc maintenant bien lancée. Et au-delà des frictions que cela va forcément encore générer, les compagnies étrangères semblent globalement décidées à ne pas trop s’éloigner du modèle impulsé par Air France. Une logique qui devrait permettre de simplifier la vie des agences, qui ne pourront jongler longtemps entre deux systèmes, au risque de désorienter les clients. Mais rien ne les empêche bien évidemment de facturer aussi des frais pour les compagnies qui les commissionneront toujours…

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